Portrait

Cécile Münch-Alligné

Enseignante et chercheuse dans le domaine de l’énergie hydraulique, Cécile Münch-Alligné multiplie les projets. Partie prenante de nombreuses recherches sur le développement de l’hydroélectricité, elle évoque avec nous son parcours, son métier et ce qui l’anime.

Interview

Cécile Münch-Alligné, enseignante-chercheure en énergie hydraulique nous plonge dans son univers

3:29 | Portrait

D’aussi loin qu’elle s’en souvienne, l’eau a toujours passionné Cécile Münch-Alligné, professeure en énergie hydraulique à la HES-SO Valais. En novembre 2023, l’Alsacienne d’origine, qui habite aujourd’hui Lausanne, reçoit le prix de la Haute école qui l’emploie pour ses recherches permettant des avancées importantes dans le domaine de la transition énergétique. Une reconnaissance importante pour celle dont le parcours plutôt linéaire a toujours été porté par les considérations liées à la force de l’eau. C’est ce qui la fascine : « Regarder un cours d’eau, c’est poétique. Mais face à une centrale, nous réalisons que l’eau transporte une force incroyable. »

Cécile Münch-Alligné

L’eau transporte une force incroyable ! 
Un parcours au fil de l’eau

Encouragée par un père professeur et chercheur, et une mère enseignante, qui lui ont très tôt enseigné les mathématiques et les sciences, c’est, presque sans surprise, qu’elle décroche son premier diplôme d’ingénieure en hydraulique et mécanique à l’Ecole nationale supérieure d’hydraulique et mécanique de Grenoble en 2002. Elle fait ensuite une incursion orientée exclusivement dans la recherche, en mécanique des fluides et transferts. Elle obtient son doctorat après une thèse sur la simulation numérique des grandes échelles de la turbulence (l’état d’écoulement d’un fluide, liquide ou gaz).

Son approfondissement dans une science fondamentale lui permet de confirmer la direction qu’elle souhaite prendre : « Je me suis aperçue que j’avais envie de travailler dans un domaine où j’aurai une action directe sur la vie des gens et de la société, et ne pas me creuser la tête sur des questions qui n’intéressent pas grand monde », dit-elle en souriant. Elle se redirige donc à l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) au laboratoire de machines hydrauliques, en tant que collaboratrice scientifique. Quatre ans plus tard, un post-doctorat et un premier accouchement en sus, elle arrive, en 2010, à la HES-SO Valais. Pour celle qui voue également une profonde admiration pour la montagne, se spécialiser en hydroélectricité, qui plus est dans le paysage valaisan, paraissait couler de source. « L’hydroélectricité joue une place centrale dans le système énergétique suisse. En me dirigeant dans cette voie, je me suis dit que je pourrais être ancrée dans les problématiques de la société.»

Cécile Münch-Alligné

Cela m’apporte cette constante remise en question qui pousse à élargir et renforcer mes compétences.
Transmission et recherche

Et elle avait raison. Aujourd’hui, l’hydroélectricité, et le développement des sources d’énergie renouvelables sont au cœur des enjeux d’avenir. Et lorsque l’on pense à demain, il nous faut penser à la relève. Après treize ans à exercer à la HES-SO Valais, Cécile Münch-Alligné n’a pas encore perdu l’envie d’enseigner. « J’aime l’idée de pouvoir transmettre des connaissances. Être au contact des étudiants, de la nouvelle génération, permet d’évoluer. Si je ne discutais qu’avec mes collègues, ce ne serait pas aussi enrichissant » poursuit-elle. Issue du milieu académique, Cécile avoue s’être pris « une claque » lorsqu’elle a débarqué à la HES-SO « car les étudiants avaient des questions très pratiques. » Mais elle sait se laisser questionner, chose également obligatoire dans la recherche. Elle ne s’en passerait pas ; « Cela m’apporte cette constante remise en question qui pousse à élargir et renforcer mes compétences.» Avoir gardé cet intérêt, tout en le combinant à l’enseignement est un équilibre idéal pour Cécile. « J’aime la variété. A la fin d’une journée de cours, je sens que j’ai transmis quelque chose, mais dans la recherche il peut se passer plusieurs jours où nous n’avançons pas d’un pouce.»

Et Cécile n’est pas une femme qui affectionne l’inertie. Elle aime que les choses bougent, et qu’elles bougent vite. « Je suis très organisée, toutes mes journées sont planifiées pour mes prochaines semaines. Cela me permet d’être très efficace. » Le risque ; « ne pas me garder des moments de temps libre ». Elle avoue qu’elle aimerait être plus présente auprès de sa famille – elle a deux filles – tout en exerçant son métier passionnant.

La digitalisation : enjeu d’avenir

Cécile Münch-Alligné coordonne aujourd’hui le groupe de recherche Hydroélectricité de la HES-SO Valais, et co-gère également l’Hydro Alps Lab, un laboratoire industriel de digitalisation dans le domaine de l’hydroélectricité.  « Nous allons être de plus en plus orientés sur l’analyse de données, avec l’utilisation de capteurs intelligents qui nous permettront, à distance, de comprendre d’où viennent les problèmes des centrales et de pouvoir prendre des mesures correctrices avant qu’une panne nécessitant l’arrêt de la centrale intervienne. Cette façon de faire est encore récente et nouvelle dans ce milieu et il s’agit d’une des évolutions les plus importantes de mon métier », explique-t-elle.

Si elle devait émettre un souhait, ce serait que l’on trouve plus de femmes dans l’ingénierie. Elle concède sur le ton de la rigolade qu’elle n’a elle-même pas réussi à convaincre ses filles. Pour celle dont Marie Curie est une source d’inspiration, il manque des modèles féminins dans les métiers techniques, des exemples « qui inspirent une nouvelle génération, en particulier féminine ».